Prévention et dépistage
Prévention primaire
En plus de l’anamnèse familiale, certains facteurs de risque sont potentiellement influés par l'individu:
- Surpoids
- Faible consommation de fruits et de légumes (campagne publicitaire recommandant de consommer 5 fruits et légumes au moins par jour)
- Nourriture riche en graisses et viande grillée ou rouge consommée journellement
- Pas d’activité physique (on recommande de marcher 30 minutes par jour au moins, avec une intensité moyenne)
- Consommation supérieure à 2 verres ou 4 dl de boisson alcoolisée par jour
- Tabac
Dépistage
Un dépistage anticipé de la population saine aurait un sens en cas de maladies fréquentes, d’évolution sur le long terme, de l’identification de tumeurs précancéreuses, de possibilités d’interventions thérapeutiques peu coûteuses.
Quand?
On diagnostique les patients asymptomatiques par rapport à l’anamnèse familiale : signes d’un syndrome HNPCC ou FAP, il faudrait effectuer un dépistage spécifique puis un contrôle. Chez les patients dont l’anamnèse familiale est positive (parents ou frères et sœurs), les directives américaines recommandent un diagnostic et dépistage au moins 10 ans avant l’âge du parent ; le but étant la détection d’une maladie ou de son évolution à un stade asymptomatique (1). Il existe deux autres groupes à risque, en plus des patients dont l’anamnèse familiale est positive:
- Patients déjà opérés de polypes intestinaux ou d’un cancer colorectal
- Patients atteints d’une IBD chronique : pour plus d’informations sur la surveillance des patients souffrant d’une colite ulcéreuse, écoutez le podcast Fortbildungs-Podcast "Colitis ulcerosa"
On fixe l'âge limite du dépistage du cancer du côlon à 50 ans pour tout le monde puisque au-delà, l'incidence et la mortalité du cancer colorectal sont en forte croissance.
Comment ?
Différentes méthodes de dépistage et différentes évidences cliniques sont recommandées pour le cancer du côlon : test annuel de recherche de sang occulte dans les selles, sigmoïdoscopie tous les 5 ans, colonographie et coloscopie tous les 10 ans (2,3).
Sang occulte dans les selles
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Test de sang occulte |
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On constate avec surprise que la recherche de sang occulte dans les selles est associée à cette étude randomisée contrôlée. D’après cette étude, le test annuel prévaut sur le test biannuel et a pour conséquence une réduction de la mortalité par cancer colorectal pouvant atteindre 33% (4) après 18 ans. Par contre, on suppose une pratique correcte du test (3 fois) et une interprétation de chaque résultat positif.
Ensuite, on effectue deux tests différents pour la recherche de sang occulte dans les selles.
- Hémocult : réaction avec les peroxydases, liés à la globuline. Comme les peroxydases qui se trouvent dans la nourriture réagissent (viande rouge, pastèques, brocoli, raifort, radis), l’impact est limité. L’interprétation du test est approximative. Des études portant sur 350 000 personnes ont montré une sensibilité au test de 48 à 74%, une valeur prédictive positive de 10 à 50%, une observance de 50 à 75 % et une réduction de la mortalité de 16 à 33%.
- Test iFOBT : anticorps monoclonaux ou polyclonaux contre hémoglobine humaine (sang). Le test est hygiénique et simple à pratiquer. Il est aussi valide que l’Hémocult pour de nombreux groupes de patients ; cependant il n’existe pas de données exactes de la sensibilité et de la spécificité. Le traitement aisé et la recherche spécifique de l'hémoglobine humaine représentent des avantages, mais le coût trop élevé reste un inconvénient. La recherche de sang dans les selles n’est pas spécifique : le diagnostic différentiel en cas de test positif comprend : les hémorroïdes et une malformation (ou anomalie) des vaisseaux, les inflammations, les polypes ou le cancer colorectal.
Tests sanguins
Certaines tumeurs présentent des modèles de méthylation d’ADN modifiées et anormales. La méthylation de l’ADN est en corrélation avec l’expression génétique. En Suisse, on trouve sur le marché un test biomarqueur du dépistage du cancer colorectal (septembre 2009). Ce test est en revanche insuffisamment validé et possède une mauvaise sensibilité dans le cas d’un dépistage précoce de cancer intestinal. En raison de ces caractéristiques et de son coût élevé, il ne convient pas pour le dépistage.
Les tests de laboratoire génétiques sont bien plus prometteurs ; même s’ils sont aujourd'hui encore au stade d'introduction ou de développement.
Sigmoïdoscopie
La méthode de dépistage par sigmoïdoscopie repose sur l’observation suivante : environ 70% des tumeurs malignes sont présentes dans le quart distal du côlon et pourtant la limitation à une partie de l’organe est finalement absurde. On sait depuis longtemps que les néoplasies malignes de l’hémicôlon droit se développent indépendamment du rectosigmoïde et que cette intervention reste à ce jour « incomplète » (5). La méthode, mise en évidence par l’étude de cas, ne s’est pas développée en Europe. En Suisse non plus, ce type de dépistage n’est pas fréquent.
Protocoles radiologiques
Le baryum à double contraste est un protocole radiologique, aujourd’hui remplacé par la colonoscopie CT (colonoscopie virtuelle). Cette dernière a considérablement évolué ces dernières années grâce aux progrès de la technologie CT et elle donne de bons résultats en cas d’adénomes d’une taille importante (5 à 10 mm). L’acceptation par les patients, par rapport à un examen est très bonne (6). Par contre, il est impossible de différencier l’histologie et la thérapie avec résultats éventuels, ce qui représente un inconvénient, alors que les patients doivent subir les mêmes préparations désagréables que pour une colonoscopie. Le remplissage de l’intestin occasionne des douleurs et la radioexposition demeure importante (pour une méthode de dépistage). Pour ces raisons, la colonographie CT dans le cadre du dépistage du cancer du côlon chez les personnes asymptomatiques est interdite dans la plupart des pays européens.
Colonoscopie
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Coloscope |
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Actuellement la colonoscopie est la mesure préventive la plus utilisée. La sensibilité de la colonoscopie est de 97%, celle de l’iFOBT est de 70%. La colonoscopie est basée indirectement sur les données de la grande étude américaine « National Polyp Study », dans laquelle on a comparé l’incidence du cancer colorectal chez les patients colonoscopies avec le nombre de patients auquel on aurait dû s’attendre, en raison de leurs données histologiques (7). La colonoscopie permet de diminuer la morbidité et la mortalité de 70 à 80%. Par contre, cette méthode de dépistage pose quelques questions: la colonoscopie peut présenter des complications et s‘avérer être désagréable, en particulier quand elle est pratiquée sans sédation. Cette méthode est toujours peu acceptée par rapport à la mammographie et au test de Pap, dans les pays où elle est déjà reconnue comme méthode de dépistage.
Comme toujours en Suisse, la question du coût reste posée, bien que la comparaison de la rentabilité avec les autres méthodes de dépistage comme la mammographie ne soit pas utile. En effet, les preuves sont insuffisantes en ce qui concerne la colonoscopie ; on ignore si elle permet de détecter un cancer du côlon au stade initial et même avancé et si elle représente une prévention adéquate pour la polypectomie (8).
Tableau : comparaison des trois principales méthodes de dépistage
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Test de selles |
Sigmoïdoscopie rectale |
Colonoscopie |
Bonne sensibilité |
- |
± |
+ |
Bonne observance |
+ |
± |
- |
Pouvant être répétée |
+ |
+ |
+ |
Simple, rapide, non invasive |
+ |
- |
- |
Conclusion
Sur la base de toutes ces données, on peut faire les recommandations suivantes : lorsqu’il n’existe pas de risque spécifique (poss. FA, polypes ou cancer colorectal antérieurs, IBD chronique, il faut à partir de 50 ans faire trois tests iFOBT, une fois par an ; on peut alterner avec une colonoscopie tous les 10 ans.
Références
1. Winawer S et al. Colorectal cancer screening and surveillance: clinical guidelines and rationale-Update based on new evidence. Gastroenterology 2003;124:544-60. 2. Schmiegel W et al. Colorectal carcinoma: prevention and early detection in an asymptomatic population--prevention in patients at risk--endoscopic diagnosis, therapy and after-care of polyps and carcinomas. German Society of Digestive and Metabolic Diseases/Study Group for Gastrointestinal Oncology. Z Gastroenterol 2000;38:49-75 3. Rex DK et al. Colorectal cancer prevention 2000: screening recommendations of the American College of Gastroenterology. American College of Gastroenterology. Am J Gastroenterol 2000;95:868-877 4. Mandel JS et al. The effect of fecal occult-blood screening on the incidence of colorectal cancer. N Engl J Med. 2000 Nov 30;343(22):1603-7. 5. Imperiale TFet al. Risk of advanced proximal neoplasms in asymptomatic adults according to the distal colorectal findings. N Engl J Med. 2000 Jul 20;343(3):169-74. 6. Pickhardt PJ et al. Computed tomographic virtual colonoscopy to screen for colorectal neoplasia in asymptomatic adults. N Engl J Med. 2003;349:2191-200. 7. Winawer SJ et al. Randomized comparison of surveillance intervals after colonoscopic removal of newly diagnosed adenomatous polyps. The National Polyp Study Workgroup. N Engl J Med. 1993 Apr 1;328(13):901-6. 8. Marbet U. et al. Das Kolonkarzinom kann dank Screening verhütet werden. Schweiz Med Forum 2003;3:56-63.
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Mediscope |
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13.025.2010 - dde |
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